Mars - Jean-Antoine Roucher
Mars
Grossis par le torrent des nèges écoulées,
Les fleuves vagabonds roulent dans les vallées ;
Et les rochers de glace aux Alpes suspendus,
Sous un ciel plus propice amollis et fondus,
Se changent en vapeurs, et pèsent sur nos têtes.
La mer gronde ; les vents précurseurs des tempêtes
Courent d’un pôle à l’autre, et tourmentant les flots,
Entourent de la mort les pâles matelots.
Mais du joug de l’hyver la terre enfin se lasse :
La terre, trop long-temps captive sous la glace,
Lève ses tristes yeux vers le père des mois,
Et frissonnante encor remplit l’air de sa voix.
Dispensateur du jour, brillant flambeau du monde ;
Des vapeurs, des brouillards perce la nuit immonde ;
Impose un long silence aux aquilons jaloux,
Et rens à mes soupirs le printems mon époux.
(...)
Jean-Antoine ROUCHER
(1745-1794)
[Les Mois", poème en douze chants]