La Mort et le Bûcheron - Jean de La Fontaine
La Mort et le Bûcheron
Un pauvre Bûcheron, tout couvert de ramée,
Sous le faix du fagot aussi bien que des ans
Gémissant et courbé, marchait à pas pesants,
Et tâchait de gagner sa chaumine enfumée.
Enfin, n’en pouvant plus d’effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe à son malheur,
Quel plaisir a-t-il eu depuis qu’il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier et la corvée
Lui font d’un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la Mort. Elle vient sans tarder,
Lui demander ce qu’il faut faire.
« C’est, dit-il, afin de m’aider
À recharger ce bois ; tu ne tarderas guère. »
Le trépas vient tout guérir ;
Mais ne bougeons d’où nous sommes :
Plutôt souffrir que mourir,
C’est la devise des hommes.
Jean de La FONTAINE
(1621-1695)
(1668)
[Fables choisies mises en vers]
"Juste étendue. La Fontaine l’a dans ses fables, Ésope ne l’a pas, ni Phèdre. On trouve dans ces trois auteurs les trois opérations du peintre : dans Ésope le croquis, dans Phèdre le dessin arrêté (et lavé), dans La Fontaine le tableau."
Jean JOUBERT
"J’aime Jean La Fontaine ami de Jean Lapin..."
Victor HUGO
"Que ne demandez-vous un conte à La Fontaine ?
C’est avec celui-là qu’il est bon de veiller ;
Ouvrez-le sur votre oreiller,
Vous verrez se lever l’aurore.
Molière l’a prédit, et j’en suis convaincu,
Bien des choses auront vécu
Quand nos enfants liront encore
Ce que le bonhomme a conté,
Fleur de sagesse et de gaieté..."
Alfred de MUSSET
[Silvia]
"... Il entra à l’Académie. Il obtint pour purgatoire d’être livré aux enfants, qu’il détestait, et qui saccagent la délicatesse de sa cadence, l’arrangement subtil de ses syllabes, la légèreté de sa raillerie, la studieuse liberté de son chant..."
Roger JUDRIN
[Boussoles]