Neige - Maxence Fermine - [Livre]

Maxence FERMINE / NEIGE / Arléa / 1999 Le premier roman de Maxence FERMINE est un poème. Un poème limpide et sobre qui oscille entre conte initiatique et roman d’apprentissage. De cette confusion des genres surgit un ouvrage magnifique, sublimé par la mélodie fragile qui émane des phrases et des mots assemblés sur le fil invisible d’un délicieux équilibre. C’est un récit de beauté et d’amour autour d’un artiste japonais du haïku au XIXe siècle. « Yuko Akita avait deux passions. Le haïku. Et la neige. Le haïku est un genre littéraire japonais. Il s’agit d’un court poème composé de trois vers et de dix-sept syllabes. Pas une de plus. La neige est un poème. Un poème qui tombe du ciel en flocons blancs et légers ». « Célébrer la beauté de la neige », « se retirer du monde pour mieux s’en étonner », tels sont les credo de Yuko, jeune poète japonais qui s’adonne chaque hiver à la perfection de son art. Mais à trop parler de la neige, ses vers finissent par manquer de nuances. Il part alors rejoindre le vieux Soseki, « maître de l’art absolu », pour apprendre à colorer ses poèmes. Et c’est en route vers cet enseignement que s’offre à lui la plus belle image qu’il lui ait été donné de voir de toute sa vie : celle d’une jeune femme prisonnière d’un linceul de glace dans la solitude des cimes enneigées. Elle était « fragile comme un songe, tendre comme un rêve ». Subjugué par la beauté d’un tel tableau, Yuko reprend son chemin à jamais transformé par l’envoûtant souvenir de ce corps diaphane dans les neiges… Ce conte initiatique est construit comme un poème dans la tradition et l’esthétique des haïkus dont le récit tire ici toute sa substance : phrases très courtes, chapitres lapidaires, mots lumineux, images choisies. Cette histoire est délicate comme un cerisier en fleurs, aérienne comme un flocon de neige. Ciselée dans une langue épurée, concise et blanche, elle rappelle ces gracieuses esquisses où les couleurs pastel sont autant de nuances de blanc ; évoque ce Japon de la fin du XIXe siècle auréolé par la pureté des traditions ancestrales. La réussite d’un premier roman se mesure souvent à son originalité, à l’effet de surprise. Mais si cette dernière est bien présente à travers ce beau texte, elle se manifeste par des voies inattendues : discrétion, modestie et simplicité de ton, mises au service d’une écriture. Neige a été suivie par le Violon noir et l’Apiculteur, formant ensemble une sorte de triptyque célébrant la couleur et la valeur initiatique d’une rencontre entre deux hommes réunis par l’image furtive d’une beauté fulgurante trop vite évanouie. En commençant par Neige, vous apercevrez beaucoup de talent d’un auteur qui, par le biais d’une musique délicieuse, élève son lecteur vers les cimes oniriques et magiques d’un conte trop vite achevé. Muze15