Départ - Victor Segalen
Départ
Ici, l’Empire au centre du monde. La terre ouverte au labeur des vivants. Le continent milieu des Quatre-mers. La vie enclose, propice au juste, au bonheur, à la conformité.
Où les hommes se lèvent, se courbent, se saluent à la mesure de leurs rangs. Où les frères connaissent leurs catégories : et tout s’ordonne sous l’influx clarificateur du Ciel.
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Là, l’Occident miraculeux, plein de montagnes au-dessus des nuages ; avec ses palais volants, ses temples légers, ses tours que le vent promène.
Tout est prodige et tout inattendu : le confus s’agite : la Reine aux désirs changeants tient sa cour. Nul être de raison jamais ne s’y aventure.
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Son âme, c’est vers Là que, par magie, Mou-wang l’a projetée en rêve. C’est vers là qu’il veut porter ses pas.
Avant que de quitter l’Empire pour rejoindre son âme, il en a fixé, d’Ici, le départ.
Victor SEGALEN
(1878-1919)
(1912)
[Stèles]
Segalen fut médecin, voyageur, archéologue - et poète. Il est mort d’une maladie mal définie, et plutôt d’épuisement, à quarante et un ans. Son ouvrage d’archéologue de la Chine est glorieux ; son œuvre de poète était jusqu’à ce jour dans la situation de ces sculptures géantes de l’époque Han qu’il découvrait parmi d’étranges et vastes terres...
Pierre Jean JOUVE